Tragédie du SAMU de Strasbourg : Les propositions de l’AMUF
Les propositions de l’AMUF pour une meilleure organisation des secours
Le 14 mai dernier, Madame la ministre des solidarités et de la santé a rencontré l’ensemble des représentants professionnels et syndicaux des urgentistes, dont l’AMUF. L’objectif étant de faire la lumière sur le drame de Strasbourg, où une jeune femme est décédée en décembre après avoir alerté en vain les services de secours.
A l’issue de cette rencontre, il nous a été demandé de préparer une feuille de route dont le but est d’harmoniser les pratiques du SAMU.
Nous avons présenté un document en neuf points que nous reproduisons ci-dessous.
Madame la Ministre,
Nous vous remercions pour ce rendez-vous et pour la diligence avec laquelle vous avez réagi suite au drame de Strasbourg et à la mort de Madame Naoemie Musenga. Nous tenons à saluer la rapidité de vos services et le rendu de l’enquête dont nous approuvons le rapport. Nous tenons à exprimer notre détermination à améliorer le service public de la prise en charge des urgences aussi bien par le SAMU que par les urgences intrahospitalières.
Il y a des divergences dans les propositions des professionnels car nous pensons que nous sommes à la croisée des chemins et que le système a besoin de réforme comme le souligne le président du conseil national de l’Ordre des médecins.
L’AMUF vous propose ces pistes de réflexions et de propositions :
- Nous demandons la création de procédures d’assurance qualité immédiates, simples et faciles, par exemple par tirage au sort d’appels dans la journée sur le modèle des centres d’appels des grands systèmes de centre d’appels. Cette exigence doit être dans les SAMU et les SDIS. Ces écoutes devraient être faites systématiquement, avec des médecins, l’encadrement, la direction et les ARMS. Devant le drame de Madame Naomie Musenga, nous demandons que les procédures en cas de dysfonctionnement soient revues dans les SAMU et que l’écoute des bandes téléphoniques si les patients ou les familles les demandent, soient toujours faites avec des médecins du SAMU, la direction de l’hôpital, dans de bonnes conditions avec l’appui des services juridiques des hôpitaux.
- Si le gouvernement va vers des procédures d’accréditations nous demandons l’ouverture de négociations pour définir les effectifs, les moyens, les objectifs de qualité avant de se lancer dans les procédures d’accréditation dont le poids technocratique est considérable. Le cas échéant nous demandons le chiffrage budgétaire, que ces budgets majorent les enveloppes MIG et soient fléchés afin de mettre aux normes l’ensemble des plateaux de régulations des SAMU.
- Concernant la formation initiale des ARMS, comme des opérateurs sapeurs-pompiers, nous souhaitons que ce métier évolue vers une reconnaissance dans le domaine de la santé et que la formation soit faite par et dans les facultés de médecine et non pas par les CESU.
- Nous sommes en opposition avec le document de Samu Urgences de France concernant l’extension du champ de travail des SAMU. L’activité des SAMU n’est pas de trouver de nouvelles activités ou de nouvelles fonctions à l’image d’une conquête de nouveau marché… mais bien de se concentrer sur la prise en charge de l’urgence. La faute politique de 2002 sur la fin de l’obligation faite aux médecins de participer à la PDS a engendré un désengagement total de la PDS. Depuis 15 ans la PDS et PDSA sont inégalitaires sur le territoire…. et toutes les carences arrivent aux urgences ou au SAMU. Vouloir que les centres de SAMU régulent toute la santé et tout le système médico psycho social va nécessiter une importante mise de fond et va rompre avec le système actuel. L AMUF souhaite au contraire que les urgences restent aux urgences et que le système de soin soit mieux organisé, chacun prenant une part de sa responsabilité sur la PDS et PDSA. Nous demandons donc l’arbitrage du gouvernement pour connaître l’orientation politique du système des urgences et, si l’orientation de SAMU urgence de France est retenue, il faudra faire évoluer les textes législatifs afin que les champs de compétences des SAMU soient étendus ce qui nous semblent totalement dénué de sens. En effet il vaudrait mieux impliquer chaque acteur de la chaine de soins dans la PDS et PDSA afin que ceux-ci retrouvent leurs rôles. Les urgences ne peuvent toujours être là pour faire ce que les autres ne veulent pas faire. Les Urgences ne peuvent être la variable d’ajustement d’un système désorganisé.
- L’objectif est de faire baisser le nombre d’appels au SAMU et le recours aux urgences hospitalières par une meilleure organisation du système de santé. Faire que le SAMU devienne la plateforme de tout le système de santé nous paraît contradictoire avec son rôle premier qui est de gérer les urgences.
- Nous voulons le renforcement du lien de coopération avec les sapeurs-pompiers ainsi que des plateformes départementales communes avec la modernisation de la réponse à l’appel des secours par le numéro unique. Nous insistons : La santé doit être gérée par le SAMU. L’échelon départemental est notre priorité avec une modernisation de la coopération entre ces deux systèmes ce qui fera gagner du temps et de l’efficience pour la prise en charge des malades.
- Nous voulons un même système informatique entre les pompiers, le SAMU et les urgences. Nous souhaitons centraliser les appels urgents vers les structures d’urgences SAMU et SDIS. Nous ne voulons pas du regroupement avec le SAMU social ou 115 qui ferait confondre toutes les priorités.
- Nous voulons le renforcement de la coopération avec les sapeurs-pompiers. Pour l’AMUF le secours à personne fait partie des urgences et de la chaîne de soins en urgence. Nous devons travailler avec les sapeurs-pompiers afin d’avoir un lien de coopération étroit et que tous les problèmes de santé soient traités par le SAMU. Nous nous rendons à l’avis des commissions IGASS et IGA pour le numéro unique et les plateformes uniques. Nous faisons confiance au gouvernement et au parlement pour fixer le choix.
- Nous demandons que tous les CTRU soient réunis avant la fin de l’été afin d’élaborer une meilleure planification et répartition des postes entre CHU et CH afin que les jeunes générations comprennent l’importance du maillage territorial dans la régulation. La connaissance de la difficulté de la régulation doit être connue de tous les personnels travaillant au SAMU.
Pour le CA de l’AMUF, nous vous remercions.
Veuillez agréer Madame la Ministre, l’expression de notre très haute considération.
Le 2 juillet 2018.