Billet d'Humeur

Les prédateurs de l’or gris

Il y a 4 ans, nous lancions Sabrina Ali Benali, Patrick Pelloux et moi-même une pétition sous le titre « Dignité des personnes âgées, des moyens pour nos EHPAD » qui avait recueilli près de 700 000 signatures.

Elle a déclenché une auto-saisine du Conseil économique social et environnemental qui a publié un rapport validant la revendication syndicale de la création de 200 000 postes, pour obtenir un ratio d’un soignant par résident. Dans le même temps les députés Caroline Fiat et Monique Iborra s’étaient saisies du dossier et validaient cette demande. Ce qui était déjà décrit à l’époque était un manque criant de personnel qui ne permettait pas de s’occuper dignement des personnes âgées dans les EHPAD. Il était souligné que malgré un prix moins élevé dans les structures du secteur public, le taux d’encadrement y était légèrement supérieur. Cela signifiait clairement que le secteur privé lucratif faisait payer plus cher ses prestations pour un service rendu de moindre qualité.

Déjà quelques années plus tôt, nous avions été un certain nombre à nous émouvoir publiquement du fait que le président de la République de l’époque avait embarqué avec lui en Chine des dirigeants de groupes gestionnaires d’EHPAD pour y vendre leurs services. Nous disions alors que cela n’était possible que grâce aux bénéfices faits en France sur le dos de la Sécurité sociale, des retraités et de leur famille. Si nous revenons quelques années en arrière, nous comprenons mieux la situation. En effet, à la fin des années 1980, le vieillissement de la population nécessitait de rénover les maisons de retraite et d’en construire de nouvelles.

Le choix politique fait alors a été d’ouvrir le marché au secteur marchand pour limiter les dépenses de l’Etat et de la Sécurité sociale. Ainsi a débuté la saga de l’or gris avec la création de groupes qui très rapidement se sont développés, se sont internationalisés pour devenir des leaders mondiaux avec des chiffres d’affaires de plusieurs milliards.

Le scandale d’ORPEA était prévisible et il est heureux qu’il éclate aujourd’hui. En effet, l’erreur originelle est de n’avoir pas empêcher les libéraux au pouvoir de livrer la prise en charge de la dépendance au marché. Il y a ici une contradiction majeure entre un secteur qui doit relever du service public et de la solidarité nationale et des investisseurs dont l’objectif premier est le meilleur retour sur leur investissement. Quand en plus, ils se comportent comme de vrais prédateurs sans âme, nous obtenons ORPEA.

La conclusion est simple : le secteur de la dépendance ne peut relever du secteur privé à but lucratif.

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